• Syrie :

    ces djihâdistes des réseaux sociaux

     

    Le blog avait déjà proposé un article sur ces jeunes hommes souvent d'origines ou de familles musulmanes qui partent faire le djihâd en Syrie. Le phénomène avait été jugé très sérieux par M. Valls début décembre. 

    Aujourd'hui, l'inquiétude vient bien du danger représenté par les réseaux sociaux. Le monde entier avait eu accès assez facilement aux images de Tunisie, d'Égypte ou de Libye grâce aux réseaux sociaux. Ils sont rapidement devenus des vecteurs d'information, de rassemblement et d'échange alors qu'internet était coupé ou qu'ils étaient le seul moyen. Dorénavant, ils deviennent salon officiel du recrutement des groupes djihâdistes syriens. 

    Ce sont Twitter, la plateforme de blogage Tumblr ou encore le site de question anonyme Ask.com où ces jeunes hommes deviennent le reflet de la nouvelle guerre, guerre parallèle à celle qui a fait plus de 126 000 morts (chiffres officiels donnés par l'OSDH) sur le territoire syrien depuis deux ans et demi. La prise de conscience de la facilité de l'utilisation des capacités technologiques à leur disposition a été fulgurante et ces organisations ont rapidement compris l'enjeu de taille. 

    Les témoignagnes sont courants. Les djihâdistes, de plus en plus actifs partagent leur expérience du conflit et racontent leur vie quotidienne tout en vantant les vertus du djihâd. 

    Alors même que la France, la Grande-Bretagne ou les Pays-Bas estiment avoir plusieurs centaines (milliers devrait-on dire) de ressortissants en Syrie, les réseaux sociaux sont devenus le mot d'ordre des groupes islamistes. Quoi de plus beau pour ces organisations qu'un moyen de communication qui annihile les frontières et dont les informations se répandent dans le monde entier par une pression de la main qui fait clignoter le petit bouton: S'abonner...

     

    C'est le cas de Ifthekar Jamar, jeune homme de 23 ans se revendicant sans problème du groupe EIIL (État Islamiste en Irak et au Levant). Originaire de Porstmouth, il contrôle plusieurs comptes twitter, comptes Keek.com ou Ask et le 14 mai il tweet avoir posé un pied en Turquie. Rappelons que la Turquie est le pays actuel par lequel passent tous les hommes voulant effectuer le djihâd en terre syrienne. 

    "Un homme quitte le confort de sa maison pour aller aider un peuple opprimé. C'est héroïque, jusqu'à ce que vous ajoutiez un homme musulman. Il devient alors un terroriste". Ces revendications se voulant dénoncer un "pseudo-racisme" pour couvrir un acte terroriste sont les paroles de Jamar...sur twitter.

    Et ce n'est pas tout. Jamar utilise totalement twitter pour encourager ses jeunes "followers" à venir le rejoindre. Tous peuvent lui poser des questions sur son expérience, sa vie quotidienne ou les possibilités d'accueil (au cas ou quand même...). Les moins courageux bien sûr passeront par Ask.

    La propagande est parfaitement rodée et elle a réponse à tout bien entendu. Il poste une photo montrant un sac rempli d'aliments pour "ceux qui s'inquiètent pour la nourriture". Enfin pour passer outre la barrière de la langue, parce que quand même, le décalage est grand, il se veut rassurant. "Je ne connaissais que quelques mots au départ. Il y en a beaucoup comme toi et tu trouveras ta place.".

    Mais Selon Charles Lister, analyste auprès du IHS Janes' Terrorism and Insurgency Center, rapporté par L'Orient-Le-Jour, ces activités de propagande et recrutement surprennent et prennent les autorités à défaut car elles sont une nouveauté.  Lister estime qu'en début d'année "il y avait des combattants occidentaux en Syrie mais ils étaient pratiquement invisibles". La grande nouveauté de ces djihâdistes du web est qu'ils ne semblent pas vouloir passer dans les mailles du filet. Autrement dit, ils ne se cachent pas franchement. "Au cours des derniers mois, ils ont commencé à devenir plus visibles. Ils ne donnent pas l'impression de vouloir se cacher. C'est assez inédit comparé à d'autres conflits".  "La seule raison pour laquelle je tweete est pour encourager les autres à faire de même", affirme Abou Foulan al-Muhajir autre combattant islamiste originaire du Danemark et qui dit avoir posé pied en Syrie dans le courant du mois d'août. 

    Enfin, un autre combattant dont le pseudo est  "Chechclear " assure sur Ask.fm que les possibles conséquences de ses commentaires publics ne sont pas un soucis pour lui. Lors d'une connexion, le 26 novembre sur le réseau de question anonymes et d'une série de question où se mèlent hollandais, turc ou anglais, Chechclear publie une photo montrant un couteau, un revolver et un Smartphone: la légende en prime, "la moitié du djihâd c'est du médiatique".

    Il va falloir faire avec dorénavant, al-Nostra semble passer maître dans l'art de l'endoctrinement via les réseaux sociaux. 

     

    Questions d'Orient - Le 30 décembre 2013


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  • Liban:

    l'assassinat de Chatah; la bombe à retardement d'un conflit civil? 

     

    L'attentat a défrayé la chronique hier, Mohammad Chatah, haut responsable de mouvement modéré du 14 Mars au coté de Saad Hariri a été assassiné lors d'un attentat à la voiture piégée à Beyrouth. L'explosion a fait sept morts et plus de 70 blessés. 

    L'homme touché n'étant pas des moindres, le ballet diplomatique d'accusation et les tensions ont immédiatement été ressenties dans les rues libanaises et à l'échelle internationale. Le Hezbollah, responsable avéré de la mort en 2005 de Rafic Hariri, grand premier ministre libanais, est encore pointé du doigt avec son voisin, le régime syrien. "Les meurtriers (...) sont ceux-là mêmes qui ont tué et continuent de tuer les Syriens à Qousseir, Qalamoun, Ghouta, Alep, Homs et Idleb", a indiqué dans un communiqué le Conseil national syrien (CNS). "Les meurtriers sont sans aucun doute l'alliance entre les régimes iranien et syrien et leurs agents au Liban et à leur tête la milice sectaire et fanatique du Hezbollah".

    Damas et le Hezbollah ont démenti fermement ces accusations, l'ambassadeur syrien à Beyrouth a même pointé du doigt l'Arabie Saoudite. "Ces accusations arbitraires et sans discernement émanent de haines politiques", s'est exclamé le ministre syrien de l'Information, Omrane al-Zohbi, cité par l'agence SANA. "Certaines personnalités au Liban n'ont jamais cessé d'accuser (le pouvoir à Damas) à chaque fois qu'un assassinat douloureux se produit dans le pays frère qu'est le Liban", a poursuivi le ministre, en allusion à la coalition du 14 Mars qui combat par le discours politique les organisations du Hezbollah et les très ingénieux services secrets syriens manipulant habillement des groupuscules. (Propos rapportés par l'Orient-Le-Jour le 28 décembre 2013)

    La coalition du 14 Mars est menée par l'ex premier ministre Saad Hariri et Chatah était un proche conseiller de Hariri. Ce dernier est tout de même la neuvième personnalité politique assassinée depuis 2005 et qui était en lutte contre le régime de Damas et le Hezbollah libanais. Comme par prémonition, quelques minutes avant l'explosion, Chatah tweet en accusant le groupuscule terroriste libanais de vouloir se construire une mainmise en termes de politique extérieure mais aussi intérieure sur le pays libanais comme a peu le faire le régime de Bachar al-Assad jusqu'en 2005. 

    Alors qu'une revendication ne fait surface, les questions sont surtout portées sur la signification qui a voulu être transmise à travers l'assassinat. C'est avant tout l'élimination d'un symbole d'un pays, un symbole de modération et un symbole d'un homme politique influent et militant. Ses proches et collaborateurs ont estimé qu'il s'agissait bien d'une grande pensée politique. 

    Chatah a occupé de hauts postes durant sa carrière: ancien ambassadeur, ministre de la finance...cet économistre libéral de gauche s'était tissé de nombreux liens, de nombreuses amitiés au cours de ses démarches dans les grandes enseignes politiques internationales. 

    Assassiné à quelques centaines de mètres de là où l'a été Rafic Hariri en 2005 et à quelques centaines de mètres de la maison de Saad Hariri, le jeu des messages a commencé pour les libanais toujours plus forts dans ce type de démarche. 

    De nombreux quotidiens y voient en premier lieu, un message fort envoyé à Hariri en proie à un mouvement de mobilisation sécuritaire général. En frappant ainsi, les terroristes montrent qu'en aucun cas leur rayon d'action n'est handicapé. Ils sont en mesure d'assassiner un membre éminent de son entourage au coin de sa rue... Peut-être une disuasion pour un retour au pays? 

    Toujours est-il que le choix de l'emplacement et de la cible est très symbolique et cela ne laisse pas planer l'ombre d'un doute au sujet des assassins. C'est ce que déplore le mouvement du 14 Mars tandis que le régime syrien et le Hezbollah se sont montrés sur le défensif immédiatement: "Attendons que la police ait analysé les caméras de surveillance, qui ont dû filmer l'arrivée et le départ des assassins, a-t-il fait valoir. C'est avec des arguments modérés qu'on doit défendre l'homme de la modérationa déclaré dans un communiqué Hikmat Dib. 

     

    Dans tous les cas, si le but était d'envenimer les animosités sunnites/chiites au Liban sur toile de crise syrienne, le pari est réussi. L'Orient-Le-Jour et son correspond sur place rapportaient aujourd'hui que l'ambiance urbaine était à la pression et que les tensions idéologiques et confessionnelles entretenaient un "climat malsein" à Beyrouth. Le quotidien libanais francophone estime que cela pourrait jouer en faveur d'une désintégration de la population libanaise. M. Sleiman, le président libanais y a vu une volonté claire de ranimer le brasier qui a jadis fait flamber en guerre civile le pays. 

    Au lendemain de l'attaque, l'imprévu sécuritaire reste le mot d'ordre qu'a laissé la bombe. Des bombes, il peut y en avoir partout et ce message est bien la signature de ce type d'acte. Le Hezbollah, qui se veut faire face à la formation possible d'un gouvernement visant à éliminer l'organisation ne veut pas laisser sa part; tous les moyens étant bons pour se faire entendre. 

    Une autre source qui a fait passer son messager par une chaine de télévision locale a estimé que Chatah était un "agent des américains et des sionistes" justifiant ainsi qu'il puisse avoir un nombre non négligeable d'ennemis au pays. 

    Contre la Syrie cette fois-ci, des preuves sont formelles, la voiture utilisée pour la bombe a été volée avec une autre à Saadiyate en novembre 2012. L'autre voiture volée aurait été retrouvée à Aïn al-Héloué aux mains d'un groupusucle récupéré et manipulépar le régime Al-Assad, Fateh al-Islam.

    Enfin le dernier message envoyé est lui envoyé à l'institution de La Haye qu'est le TSL (Tribunal Spécial Libanais) qui doit jugé dans moins de vingt jours, le 16 janvier, cinq membres du Hezbollah accusés de complicité ou meurtre dans l'assassinat d'Hariri. Intimidation, provocation? 

    Ce type d'attentat semble tirer la sonnette d'alarme du retour à un état d'insécurité étatique, forçant les membres politiques modérés en opposition aux groupes terroristes à mener une vie clandestine dans un soucis de sécurité. 

     

    Questions d'Orient/ Le 28 décembre 2013


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  • Syrie / Russie:

    prospection, exploitation, guerre

     

    C'est dans un contexte d'enlisement profond de la guerre civile en Syrie que le régime du président Bachar al-Assad a signé hier, un traité de prospection de ses réserves de gaz et pétrole avec la Russie. 

    C'est l'allié traditionnel qui s'y colle d'autant qu'un tel accord permet un engagement à long terme et une assurance de relations stables car acceptées pour 25 ans. Car oui, c'est pour 25 ans que viennent de s'engager les deux puissances, ce qui traduit un mépris et une ignorance totale de la guerre qui ravage le pays. En acceptant un tel contrat sur une telle durée il faut y voir de la part de la Russie, une marque de très grande confiance en l'échec de la rébellion et une assurance du maintien de Bachar (du moins des alaouites) au pouvoir pendant un certain temps. 

    Pour ce qui est concrètement de l'accord, il doit prospecter ce qui apparaît actuellement comme la réserve la plus importante de la Méditerranée et s'affiche comme le premier accord de prospection gazière et pétrolière dans les eaux territoriales syriennes. 

    "Il s'agit du premier accord jamais signé portant sur une exploration de gaz et de pétrole dans les eaux syriennes", a indiqué mercredi le directeur général de la Compagnie générale syrienne du pétrole Ali Abbas. Il a été pensé et conçu au siège du ministère du Pétrole et des ressources minières à Damas par le ministre syrien du Pétrole, Sleimane Abbas, la Compagnie générale syrienne du Pétrole et l'entreprise russe Soyuzneftegaz company.

    Alors même que l'imbroglio total règne sur les villes détruites de Syrie et que les voisins, occidentaux et ONG interviennent à bon ou mauvais escient, cette récente découverte d'un tel potentiel offshore pour un pays en crise dans une région en crise n'a pas fini d'exciter les voisins, alliés ou non. C'est la Syrie, le Liban, Israël et Chypre qui vont avoir à entamer leur ballet diplomatique pour jouer leurs cartes. Inutile de penser que cela va déclencher de "nouveaux conflits", Liban et Syrie sont déjà "officiellement' en guerre contre Israël. 

    Le coût de la prospection a été estimé à 100 millions de dollars sur une surface de 2190 km² et devra s'effectuer sur plusieurs phases. Mais "le jeu en vaut la chandelle"! Les évalutions portent à 38 000 milliards de pieds cube de gaz les réserves fraichement découvertes. 

    D'après la revue Oil and Gaz Journal, la Syrie possède déjà des réserves bien supérieures à ses voisins (Irak exclu) avec 2.5 milliards de barils. Fin 2012, les réserves prouvées étaient de 8.500 milliards de pieds en gaz.

    Mais le régime al-Assad a aussi "payé" son engagement répressif contre le soulèvement populaire et les sanctions internationales multiples depuis mars 2011 ont fait chuter de 90% la production pétrolière syrienne. Au premier semestre, la production gazière est passée de 30 millions de mà 16.7 millions. Pour ce qui est du pétrole, aux 380 000 barils extraits par jour ont succédé des chiffres beaucoup faibles de 39 000 barils par jour. 

    Alors même que le Kremlin vient d'annoncer que Genève 2 serait difficile à maintenir le 22 janvier en raison des conjonctures géopolitiques et diplomatiques, la signature de ce contrat intervenue après "plusieurs mois de longues négociations" entre les alliés syriens et russes, "constitue un défi", a déclaré le ministre syrien mais c'est aussi "la preuve de la poursuite de la coopération entre les deux peuples et gouvernements syrien et russe"; petit détail qui risque fort de ne pas satisfaire l'opposition. 

    La Coalition de l'opposition a estimé jeudi nul l'accord venant d'être passé entre les deux camps tout en brandissant la voix de refus du "peuple syrien tout entier". "La Coalition condamne cette signature qui vise à donner les richesses de notre sous-sol contre des armes russes destinées à tuer le peuple syrien", écrit le mouvement dans un communiqué. "La signature par la société russe d'un des plus importants contrats dans la région avec le régime criminel, alors que les combats se poursuivent sans répit, met en évidence le fait que le gouvernement russe a signé un accord pour fournir au régime des armes supplémentaires pour tuer le peuple syrien", n'a pas manqué d'ajouter l'opposition.

    La Russie a aussitôt été accusée de crimes en alliance avec le régime puisque la guerre...ça ne se fait pas sans les sous !

     

    Questions d'Orient/ Le 26 décembre 2013


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  •  

    Je souhaite de très bonnes fêtes de Noël à tous les visiteurs du blog, toujours plus nombreux!

    Merci d'avoir donné un vrai élan au blog! 

    Une pensée pour les militaires français dans des contrées lointaines en guerre, ce soir, loins de leurs familles. 

     

    E. Baptiste, administrateur du blog. 


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  • Égypte:

    dans le chemin pour un retour à un État policier?

     

    Dans une Égypte en crise sous tous points de vue, l'appareil militaire, seul pôle de stabilité ne cesse de renforcer sa puissance. Et les agissements autoritaires du ministère de l'Intérieur sous la coupe du ministre de la Defense, le général Sissi, fait craindre le retour à un État policier. 

    Trois figures de la révolte contre l'ancien dictateur, M. Moubarak, ont été arrêtés et condamnés à la prison, accusés de manifestions illégales. Ce sont Ahmad Maher, Mohammed Abdel et Ahmad Douma. Leur condamnation qui paraît injustifiée fait craindre le retour d'un État brutal et comparable à celui d'Hosni Moubarak. Ce sont les premiers manifestants non islamistes arrêtés depuis la destitution du président islamiste M. Morsi, le 3 juillet de cette année. 

    Cela paraît d'autant plus injustifié et injuste que les jugements interviennent au lendemain de l'acquittement des deux fils Moubarak et de Ahmad Chafiq dans des affaires de corruption. Chafiq a été le dernier Premier ministre de Moubarak, candidat au second tour de la présidentielle contre Morsi puis défait par ce dernier. 

    14 ONG égyptiennes craignent l'anéantissement des progrès et des promesses de l'armée depuis la destitution de Morsi et voient le retour d'un "État policier plus brutal de jamais". Pour nombre de militants des premières heures, ce nouveau pouvoir est comparable à  « l'avant-révolution ». « Il est clair que le pouvoir laisse désormais la responsabilité exclusive du dossier de l'activisme politique et public à l'appareil sécuritaire, comme cela était le cas » du temps de M. Moubarak, accuse ainsi le communiqué des 14 ONG égyptiennes. Rapporté par l'Orient-Le-Jour, M. Dorsey,chercheur à l'École d'études internationales S. Rajaratnam de Singapour déclare que "Dans les faits, (le régime) conserve un pouvoir autocratique. Si l'on ajoute à cela la loi sur les manifestations, il n'y a plus qu'un espace extrêmement réduit pour la contestation".

    Il faut dire que le texte adopté début décembre et qui doit passer en référendum les 14 et 15 janvier prochains n'a cessé d'alerter les militants éclairés. Cette constitution nouvelle consolide la toute puissance de l'appareil militaire dans le processus de "transition démocratique" promis par l'armée au lendemain de la destitution de Morsi. 

    Ne serait-ce que d'un point de vue historique, il faut aussi voir que l'armée en pays d'Égypte a toujours eu un poids considérable, toujours présente lors des changements politiques importants, parfois en tant qu'actrice principale. En 1952, c'est l'armée qui met fin à la monarchie puis prend le pouvoir après l'évincement de Moubarak puis c'est encore elle qui destitue Morsi. Beaucoup d'intérêts sont donc en jeu pour cette institution et par le texte de Constitution ce sont des privilèges de six décennies qui sont maintenus tout cela en parallèle avec une augmentation du poids de l'institution sur la vie politique. 

    Depuis le début de la crise, l'armée est encore la seule institution comme je le disais au départ "pôle de stabilité" dans le sens où jamais l'appareil militaire n'a été réellement inquiété. Encore actuellement, dans un pays en crise profonde, l'armée est parvenue à conserver une indépendance totale, et une immunité légale. Cela se traduit par exemple par l'absence de droit de regard du Parlement sur le budget de l'institution. D'autre part, dans les décisions de transition en cours, l'armée a réussi un coup de maitre en s'emparant avec brio d'une partie de l'exécutif: dorénavant la nomination d'un nouveau ministre de la Défense (qui devra obligatoirement être un militaire) doit recevoir l'accord de l'institution armée. Cette nouvelle mainmise sur le pôle exécutif n'est pas sans conséquence sur la vie politique égyptienne. Cité par l'Orient-Le-Jour début décembre, le politologue Hassan Nafaa voit dans ces dispositions nouvelles "un sujet d'inquiétude", surtout si le général Abdel Fattah al-Sissi, commandant en chef de l'armée, actuel ministre de la Défense, vice-Premier ministre et véritable homme fort du pays, décide de ne pas se présenter à l'élection présidentielle. "Quelle sera alors la relation entre le président élu et le Premier ministre, d'une part, et leur ministre de la Défense, d'autre part, qui ne se sentira pas subordonné à leur autorité". A juste titre cela pourrait déboucher sur un "pouvoir à trois têtes vecteur d'instabilité".

     

    Questions d'Orient/ Le 24 décembre 2013


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